Kazuhiro Kuno – Aux confins de la nostalgie

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Kazuhiro Kuno, Landscapes of the Earth, 2018-2019, huile sur toile, 136 x 181,8 cm, Nagoya Gallery Co. Ltd. (Nagoya)
 
Qu’est-ce que la nostalgie ? « Une émotion poignante, complexe, que l’on ressent lorsqu’un moment ou un paysage présent ravive des souvenirs d’un temps révolu que l’on ne pourra jamais revisiter », écrit Hitoshi Yamamura, conservateur en chef du Tokyo Metropolitan Art Museum. Lors de la dernière exposition du musée d’Ueno consacrée à ce thème très précis de la nostalgie, un artiste l’a exprimé mieux que tout autre : avec quelques peintures de grand format, Kazuhiro Kuno a rempli l’espace d’une nostalgie infinie – des panoramas d’espaces naturels intemporels, vides de présence humaine, de longues routes infinies, avec seulement quelques sommets montagneux à l’horizon. Les seules couleurs présentes des aplats de vert et de brun terreux, et les seuls « habitants » des toiles, des arbres, tels ces pins majestueux dont la présence est si forte. La moitié du tableau est constituée par les cieux – une surface vide, claire et bleutée, presque transparente: une manière de représenter l’yohaku no bi (« la beauté de l’espace vide »), concept-clé dans l’esthétique japonaise. Né dans la préfecture d’Aichi en 1938, le peintre, décédé en 2022 à l’âge de 83 ans, n’a cessé de peindre les paysages de l’Italie, où il a vécu, étudié et voyagé. Dans sa série des « Earth Landscapes » (Paysages de la terre) Kuno peint à maintes reprises les environs de Tarquinia, dans le Latium romain, où se trouvent des ruines étrusques, « un lieu de nostalgie inoubliable » qu’il a visité à l’âge de 48 ans. Ses grands panoramas peuvent nous rappeler l’œuvre de Paul Cézanne (en particulier sa majestueuse montagne Sainte-Victoire), mais son inspiration suprême se trouve chez Giotto, dont les fresques ont eu une énorme influence sur lui. En 2010, dans une publication de la Musashino Art University Press, Kuno a pu écrire : « Debout sur la terre antique d’Italie ayant un lien profond avec le temps historique, je contemple la frontière entre le ciel et la terre. « Regarde bien la nature. Si ton art s’éloigne de la nature, source de beauté infinie, tu perdras ta muse et toi-même aussi. Crée la peinture vivante que tu conserveras dans ton cœur. » La voix du grand maître Giotto qui prêchait un retour à la nature, semblait murmurer à mon oreille de loin, à l’horizon. » De Giotto à Kuno, de l’Italie des Primitifs au Japon du XXème siècle, un même fil se tisse: peindre le plein et le vide, la terre et le ciel. 

Giotto di Bondone, Tryptique Stefaneschi, 1320, Pinacothèque du Vatican, Rome

 
Paul Cézanne, Montagne Sainte-Victoire, vers 1890, huile sur toile, 65 x 95,2 cm, © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
 
 
Expositions passées (sélection) :
Expositions Ryoyo-no-me 1991-2009 (1999, Prix Kawahita Michiaki)
Exposition Prix Yasui 1967-1986
Le monde de Kazuhiro Kuno, Musée d’art d’Ikeda, 2021
« Katasumi ni aru Sekai no Eien » (L’éternité dans un coin du monde), Galerie Nagoya, 2024
 

Kazuhiro Kuno, Landscapes of the Earth, Moment by Moment, 2004-2005, huile sur toile, 130,5 x 194,3 cm, Courtesy Nagoya Gallery co. Ltd. (Nagoya)

Kazuhiro Kuno, Antique Earth (IV) Tarquinia, 1990, huile sur toile, 112 x 194 cm, Courtesy Nagoya Gallery Co. Ltd. (Nagoya)

Découvrez plus sur l’œuvre de Kazuhiro Kuno et visitez le site de la Nagoya Gallery (Nagoya): https://www.nagoyagallery.co.jp/

Remerciements à Shin’ichi Nakayama, Directeur Nagoya Gallery

 

 

Plus sur l’exposition Nostalgia Scenery in memory, Metropolitan Museum of Art Tokyo, Novembre 2024-Janvier 2025 ↩︎
 
 
 
 
 
 
 
 

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